Le double discours des représentants du culte musulman trahit une réticence à l’assimilation
Vingt-quatre heures après avoir tenu des propos intolérables sur la liberté d’expression, Mohammed Moussaoui évoque une « maladresse ».
Pourtant, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) a eu de longues minutes pour préciser sa pensée et l’étayer ; il ne s’agit donc pas exactement d’un « dérapage ». Ses déclarations sont dans la continuité du discours toléré par la France de la part de ses instances musulmanes, depuis plus de vingt ans.
L’intégrisme n’a absolument pas fléchi devant la mansuétude politique et ses accommodements lâches
« Il ne faudrait pas laisser s’installer l’idée que les musulmans de France sont provoqués par ce type de caricatures ». C’est en ces mots que le président du CFCM (Conseil français du culte musulman), haut représentant reçu lundi à l’Élysée par Emmanuel Macron et interlocuteur privilégié de l’État, analyse la montée des tensions entre la France et une partie du monde musulman. Mohammed Moussaoui en rajoute une couche ; par une pirouette douteuse, il explique que la censure doit s’exercer auprès des dessinateurs et autres blasphémateurs car, sinon, les caricatures pourraient être exploitées par les terroristes. Traduction : il ne faut pas froisser les ennemis de la République.
"Il faut savoir renoncer à certains droits pour que la fraternité puisse s'exprimer dans notre pays"
Mohammed Moussaoui, président du conseil français du culte musulman, sur le droit à la carricature#ApollineMatin pic.twitter.com/LyMdMAHGpk
— RMC (@RMCinfo) October 27, 2020
L’universitaire, par ailleurs décoré de la médaille de chevalier de l’ordre national du Mérite sous la mandature de François Hollande, enfonce le clou en estimant que « pour préserver l’ordre public, parfois on est obligés de renoncer à certains droits », avant de se lancer dans une comparaison hallucinante avec le Covid, qui « nous impose à tous des mesures de protection pour se protéger mutuellement ». Invoquant le « devoir de fraternité », il appelle à de la « pédagogie » des deux côtés, comme si les Français devaient prendre en compte la susceptibilité de ceux qu’ils caricaturent : irrésistible marche vers un affaiblissement – synonyme à terme de disparition – du droit au blasphème.
Marchandages et sempiternelles plaintes
Comment accueillir les regrets de Mohammed Moussaoui et admettre leur sincérité, quand l’association qu’il préside n’en est pas à son coup d’essai ? Au moment de l’affaire Mila, alors que la jeune femme croulait sous les menaces de mort, le délégué du CFCM Abdallah Zekri arguait qu’elle l’avait « cherché » et devait assumer. Quelques années avant l’attentat de Charlie Hebdo, Mohammed Moussaoui avait réagi, au nom des musulmans de France, à des caricatures publiées dans le journal satirique : « Il s’agit bien d’une intrusion agressive et gratuite dans les tréfonds de leurs sentiments religieux. Il s’agit d’une provocation ».
En remontant le temps, on observe qu’apparaissait déjà au moment de l’établissement d’un islam de France – ou plutôt durant sa genèse – une opposition à certains principes de notre société. En 1999, Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Intérieur et désireux de structurer la deuxième religion du pays, soumit aux organisations islamiques un texte qui ne pouvait « faire l’objet d’une négociation ». Pourtant, les pouvoirs publics, à la demande de l’UOIF (Union des organisations islamiques de France) ont à l’époque amendé le texte.
Alors que le droit musulman prévoit la peine de mort pour l’apostasie – châtiment présent dans la charia et les hadîths –, on peut lire sur ce rapport du Sénat que « ce texte est accepté mais au prix d’un compromis sur son contenu. La mention du droit de changer de religion est notamment retirée à la demande de l’UOIF ». La pusillanimité ne date donc pas d’hier.
L’islam politique ne sera jamais rassasié de nos compromissions
Il est totalement mensonger et malhonnête d’invoquer la liberté de croyance quand il n’y a rien de spirituel dans la démarche d’un islam politique. Ces revendications ne relèvent pas tant d’une sensibilité religieuse, que d’une orthopraxie dont une partie de nos compatriotes musulmans refusent de se distancer, faisant sans cesse référence dans leurs doléances aux textes et paroles de leur livre. La défaillance de la France dans l’application du principe de laïcité est actée à partir du moment où elle ne met pas les musulmans face à leurs responsabilités. Dans l’état actuel des choses, la voix des musulmans est inaudible, discordante, contradictoire. Leurs réponses quant à la compatibilité de l’islam avec les valeurs républicaines mettent chaque jour en lumière un schisme irréconciliable entre deux franges impossibles à quantifier – et parfois même à distinguer – : les musulmans de France, intégrés, républicains, et les adeptes d’un islam rigoriste.
L’expérience et le discernement nous indiquent que l’islam politique – qui est en soit un radicalisme – ne sera jamais rassasié de nos compromissions. Demain, nous ferons face à de nouvelles exigences, jérémiades et intimidations. L’intégrisme n’a absolument pas fléchi devant la mansuétude politique et ses accommodements lâches : il en est au contraire sorti renforcé, et nous menace aujourd’hui plus que jamais. Jean-Paul Sartre disait détester les victimes « quand elles respectent leur bourreau », et les islamistes partagent avec certitude ce sentiment. Les bougies, marches blanches, appels à ne pas stigmatiser et cœurs en papier mâché doivent urgemment faire place à l’élaboration d’un nouvel arsenal juridique, ferme et parfaitement applicable, afin de passer à l’offensive contre les ennemis de la France – seule issue pour que la peur change de camp.