Le site Al-Mayadeen a rapporté le 12 octobre courant que les Américains ont demandé à Israël de se concentrer sur Gaza et de leur laisser le soin de s’occuper du Hezbollah libanais.
C’est ce que le commentateur des affaires militaires, Alon Ben David, aurait déclaré sur une chaîne de télévision israélienne : Channel 13. Tout en se demandant si une opération préventive devait être lancée contre le Hezbollah, il aurait ajouté ; «Il semble que les Américains influencent la décision israélienne ou cherchent à apporter une solution à la confusion en Israël».1
Les réseaux sociaux et télévisions locales avaient rapporté des informations plus explicites :
«Scoop de Amichai Stein : L’administration américaine a envoyé des messages via les canaux diplomatiques au Liban et via des éléments régionaux liés au Hezbollah : le Hezbollah doit rester en dehors de la scène. Parce qu’en cas de guerre ; le Liban en tant que pays sera endommagé et blessé par Israël … le 9 octobre 2023».
Et, ce 14 octobre, The Times of Israël a publié il y a quelques heures que le chef du Conseil de sécurité nationale israélien, Tzachi Hanegbi, a déclaré qu’Israël aussi avait fait passer des messages pour dissuader le Hezbollah de se joindre au Hamas. Il a ajouté : «Notre objectif est de ne pas nous laisser entraîner dans une guerre sur deux fronts… Nous pensons que le Hezbollah n’invitera pas à la destruction du Liban, parce que ce ne sera pas moins que cela s’il y a une guerre là-bas…».2
La Syrie a reçu également sa part de menaces :
NdT : Traduction du titre d’Ynet vraie ou inexacte, la presse arabophone rapporte que Washington et Tel-Aviv ont menacé d’attaquer la Syrie et d’attenter à la vie du président Bachar al-Assad si le Hezbollah intervenait dans leur guerre déclarée à Gaza. Les Émirats arabes unis auraient été chargés de transmettre ces menaces au président syrien. Entretemps, des missiles israéliens ont mis les deux aéroports internationaux d’Alep et de Damas hors service le 12 octobre3 et, dans la soirée de ce 14 octobre, de nouvelles frappes ont ciblé Alep et son aéroport4 qui venait juste d’être remis en service.
Un haut responsable arabe a donné le conseil suivant à une éminente personnalité libanaise : «Voulez-vous échapper à l’enfer ? Pour cela, vous n’avez que l’Amérique». Mais avons-nous une quelconque influence sur l’agenda américain ? Ou plutôt, y a-t-il un seul Arabe qui puisse influencer l’agenda américain ?
Or, voici arrivé l’instant dramatique. L’armada américaine, y compris l’armada nucléaire, accourt au service du Temple et nous ramène à notre éternelle question : «Qui dirige qui, les États-Unis d’Amérique ou Israël ?».
Il y a des années, Edward Saïd avait écrit : «La relation entre Washington et Tel-Aviv est plus que stratégique et plus qu’idéologique». De quoi se demander à quel point les Puritains ayant fui l’Angleterre vers l’Amérique dans la seconde moitié du XVIIe siècle ont fini par habiter le subconscient religieux et philosophique des États-Unis d’aujourd’hui. Le milliardaire new-yorkais Sheldon Adelson n’a-t-il pas déclaré : «En tant qu’Américains, nous attendons l’apparition du Messie en Terre promise» ? Et ce, sans que nous comprenions pourquoi des rabbins de toutes les religions croient que le Sauveur viendra pour marcher sur les crânes des humains. En l’occurrence, quels autres crânes que ceux des Arabes seraient piétinés à l’heure d’une telle apparition ?
Un ancien diplomate égyptien nous a provoqués en disant : «Le porte-avion américain en Méditerranée est en mission diplomatique, non militaire», c’est du moins ce qu’il semble avoir retenu de la théorie de Henri Kissinger : «la valise ou le tank» ; (autrement dit : déguerpir ou mourir ? ; Ndt). Mais soyons réalistes et posons la question de savoir si seuls les Américains sont au service d’Israël.
Le fait est que des Arabes sont aussi à son service. Quand avons-nous vu une arme brandie par un dirigeant arabe face à Netanyahou ? Si bien qu’il semble que le monde entier soit du côté d’Israël. Même l’Allemagne lui envoie deux drones de combat Heron TP pour qu’ils participent à la guerre contre les Palestiniens, alors qu’Olaf Schulz s’est montré surpris de voir que le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, n’a pas revêtu sa tenue militaire pour se tenir aux côtés du ministre israélien de la Défense, Yoav Galant.
Par ailleurs, ce n’est sans doute pas le moment propice de demander aux dirigeants du Hamas où en est leur parrain turc, maintenant que nous avons appris que ceux qui ont préparé l’opération «Déluge d’al-Aqsa» contre Israël avaient mis de côté le tarbouche du fondateur des Frères musulmans, Hassan al-Banna, au nom de cette terre qui a souffert et souffre encore des horreurs des piétinements barbares.
Quoi qu’il en soit, lorsque Netanyahou et tous les politiciens d’Israël disent qu’ils anéantiront tous les membres du Hamas alors qu’ils envisagent d’anéantir ou d’expulser tous les Palestiniens, comment se pourrait-il qu’ils ne pensent pas à anéantir tous les membres du Hezbollah et même tout Libanais qui refuse de voir flotter l’étoile de David sur ses épaules ?
Anéantir le Liban après Gaza ? Savent-ils ce qui les attend à Gaza et ce qui les attend au Liban ? D’où la diplomatie de l’ombre menée par les États-Unis, loin du vacarme militaire, afin d’empêcher le tremblement de terre qui se produirait.
D’ailleurs, les articles du quotidien israélien Haaretz témoignent de la surprise de leurs rédacteurs devant les propos du leader du Likoud quant au changement escompté du Moyen-Orient ; un changement que les présidents américains ont été incapables de réaliser depuis George W. Bush jusqu’ici.
Quiconque lit derrière les visages et entre les lignes se rend compte que les États-Unis ont peur pour Israël, peur de toute explosion qui pourrait modifier la carte stratégique du Moyen-Orient contrairement à leurs intérêts, même si certains considèrent que l’envoi de leur puissante armada devrait nécessairement semer la panique chez ceux qui témoignent de leur hostilité à leur égard ou à l’égard d’Israël.
Sans revenir sur les commentaires américains quant à l’intérêt militaire d’une telle démarche, quel serait l’impact du porte-avions et des sous-marins nucléaires sur le Hezbollah ? Absolument aucun. À ce propos, une comparaison imaginée par Edward Clark, un blogueur américain, a retenu notre attention : deux hommes se trouvent dans une pièce, l’un porte une bombe nucléaire et l’autre porte un couteau. La question est : qui l’emporte ?
Le penseur et professeur américain Leo Strauss pensait que les Arabes «ne sont même pas aptes à servir de carburant en enfer» et son élève William Kristol avait ajouté : «Dieu se tient là où se tient l’Amérique».
De telles personnes sont responsables de l’hystérie de certains. Une clique qui a amené Shlomo Sand -l’historien et auteur du livre «Qui a inventé le peuple juif ?» – à dire que ce sont leurs semblables qui «poussent les Israéliens au suicide» et à demander de qui sont-ils les héritiers : de Moïse ou de Nietzsche ?
Aujourd’hui, face à la barbarie qui détruit Gaza, Shlomo Sand pourrait se demander : «jusqu’où le serviteur conduira-t-il son maître ?».