«Il est plus essentiel que jamais d’enseigner à nos enfants et petits-enfants l’importance de notre alliance avec l’État d’Israël. C’est notre allié stratégique le plus important – et c’est un ami cher des États-Unis d’Amérique. Si nous ne parvenons pas à sensibiliser nos enfants à l’importance d’Israël, nous risquons d’élever une génération qui ne voit pas la nécessité de protéger notre plus important allié stratégique. Les Américains doivent toujours comprendre l’importance de cette terre que Dieu a promise aux Israélites ; ils doivent respecter le peuple juif et l’État d’Israël ; et ils doivent toujours être du côté de la liberté et du bien, jamais du côté du terrorisme et du mal». («Protéger la terre promise» par la gouverneure Kristi Noem (R-SD))
Pas facile d’être un républicain américain. Pour ma part, je n’enseignerai certainement pas à mes enfants «l’importance» d’Israël ; au lieu de cela, j’enseignerai à mes enfants qu’Israël n’est pas un allié de l’Amérique et que les juifs ne sont pas les amis des non-juifs.
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Récemment, la violence et la guerre au Moyen-Orient ont repris. Après avoir subi ses pires violences palestiniennes après que les combattants du Hamas se sont évadés de la prison de Gaza et ont massacré des centaines et des centaines de citoyens israéliens et en ont kidnappé au moins une centaine d’autres le 7 octobre 2023, Israël a pilonné le territoire densément peuplé de Gaza ces derniers jours. De toute évidence, la violence dirigée contre les non-combattants est atroce et je suis tout près des familles israéliennes qui font face à la perte de leurs proches – ou des proches de leurs proches. Peu importe ce que je dis ci-dessous – et ce n’est pas une question de vertu, je ne tolère pas le ciblage aveugle de civils, hommes, femmes et enfants. Pour un Gentil, je connais plus d’Israéliens que l’Américain moyen – et de loin. Mes opinions ne s’adressent pas tant à eux qu’à leur pays, qui constitue une menace internationale. De plus, ce n’est pas une défense de l’islam.
Même sans parti pris pour l’islam
J’ai une vision très sombre du monde islamique et de l’islam lui-même. C’est une religion laide et pathologique qui confine ses adeptes dans une glorification de la violence contre les non-musulmans. Le fait que je souhaite voir le droit international, qui est lui-même une création des valeurs européennes, appliqué n’a pas grand-chose à voir avec le fait que les victimes du non-respect par Israël de ce droit sont des musulmans.
Bien entendu, je ne souhaite pas exagérer ce qui s’est passé en Israël le 7 octobre 2023. Chaque jour, partout dans le monde, les civils sont victimes de violences politiques. C’est une chose terrible, mais si ce qui s’est passé en Israël est encore frais dans nos esprits – comme si c’était le seul endroit sur la planète où une telle violence se soit produite – c’est parce que nous avons été littéralement bombardés d’une couverture médiatique ininterrompue sur ce qui ne peut qu’être qualifiée de pornographie victimaire. Cela ne minimise pas l’horreur de ce qui s’est passé dans le sud d’Israël ce jour-là, mais lorsque les choix éditoriaux de ce que nous voyons et lisons sont dictés par des gens qui veulent que nous nous concentrions uniquement sur les victimes israéliennes, nous voyons que notre acharnement contre la violence politique dans d’autres pays comme l’Arménie ou le Nigeria ne sont qu’une conséquence de ce qu’on nous montre ou non.
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Notre axiome politique
Aux États-Unis, nous entendons de tous les côtés, en stéréo, qu’Israël est «notre plus grand allié et ami». C’est unanime et bipartite, et ça n’est jamais contesté. Bien entendu, le contester, même indirectement, revient à s’exposer à l’accusation d’antisémitisme, ce qui, aux États-Unis, n’est pas une promenade de santé. Mis à part les théories du complot antisémites, si un truisme de la realpolitik est que vous êtes gouvernés par ceux que vous ne pouvez pas critiquer, alors il ne fait aucun doute que nous sommes gouvernés par les juifs et leurs sympathisants. Il s’agit d’une reconnaissance de fait – que je sois d’accord ou non n’a pas d’importance. Nous vivons dans un pays qui punit la dissidence de cette orthodoxie.
Les axiomes politiques sont des choses puissantes : pour l’Américain moyen, certains principes sont des socles. Comment ils ont été instaurés, ou pourquoi ils sont considérés comme tels, ce n’est jamais remis en question une fois que l’axiome est devenu un élément incontournable de la vie américaine. En ce sens, nous sommes un peuple très ennuyeux, mais je ne suis pas sûr que nous soyons très différents de toute autre communauté politique, actuelle ou historique. La réalité est qu’il faut du courage, de l’intelligence et, surtout, de l’imagination pour remettre en question les axiomes politiques – pour voir le monde sans la béquille mentale qu’ils fournissent. Il faut beaucoup de courage pour imaginer un monde dans lequel ces axiomes seraient renvoyés dans l’arène du discours pour voir comment, le cas échéant, ils se comporteraient sur le marché des idées politiques. Le soutien réflexif et sans réserve de l’Amérique à Israël s’inscrit clairement dans ce paradigme axiomatique.
Israël face à nos intérêts
La triste réalité qui se cache derrière ce paradigme, c’est qu’Israël n’est pas simplement «notre plus grand allié», mais que notre soutien à Israël contrevient directement aux intérêts des Américains du monde entier et contredit les valeurs anglo-américaines les plus fondamentales que nous défendons. Non seulement nous ne devrions pas soutenir Israël – militairement, économiquement ou culturellement – mais nous devrions le traiter comme un paria politique. Nous en sommes très loin, mais Israël est devenu un monstre international, précisément grâce au soutien sans réserve des États-Unis. Retirez cela et Israël se retrouvera dans d’énormes problèmes, peut-être existentiels. Comprendre cela, c’est savoir pourquoi les partisans d’Israël sont aussi fanatiques qu’ils le sont : un trou dans la digue du soutien américain, aussi insignifiant soit-il, est quelque chose qui doit être frappé durement par les berserkers juifs enragés, car tout le château de cartes pourrait s’effondrer. Et ils le savent.
Mais revenons à l’axiome politique selon lequel Israël est «notre plus grand allié». Examinons cela un peu. Mis à part toutes les autres considérations, une alliance entre pays est généralement motivée par trois facteurs de politique étrangère : les avantages réciproques, l’harmonie culturelle/civilisationnelle, des valeurs symétriques, et les considérations économiques. Au seuil de toute alliance entre États se trouve la proposition selon laquelle chacun bénéficie de la relation – et ce bénéfice doit reposer sur une certaine réciprocité. Dans le fonctionnement normal d’une politique étrangère, le concept de contrepartie est une évidence. La nécessaire mutualité entre les pays est liée à l’harmonie civilisationnelle qui existe entre eux ; ainsi, le Royaume-Uni et les États-Unis sont des alliés naturels en raison de leur histoire et de leur culture communes. Pour nous, plus largement, l’Europe occidentale et les États-Unis partagent une civilisation, ce qui fait de l’alliance moins une considération qu’un résultat de cette civilisation commune. En fait, c’est cette civilisation partagée qui rend la similitude des valeurs si prédominante. Au moins historiquement, nous valorisons l’État de droit, la démocratie relative, les libertés de presse, d’association et de religion – et dans chacune de ces valeurs politiques, les États-Unis et l’Europe occidentale étaient largement alignés – à tel point que nous n’avons jamais eu besoin de négocier ces valeurs afin de nouer une alliance. Bien sûr, je ne défends pas sans réserve la civilisation des Lumières qui s’est développée au cours des trois ou quatre derniers siècles, mais je fais simplement remarquer que les Américains partagent généralement certaines valeurs politiques avec leurs homologues d’Europe occidentale, et que cela va de soi. Il en va de même pour les pays islamiques et leurs valeurs, ainsi que pour les pays d’Amérique latine ou d’Asie de l’Est et leurs valeurs. Enfin, outre que cela garantit des relations pacifiques, les considérations économiques déterminent la politique étrangère – le commerce et le développement économique sont des moteurs que nous considérons comme des amis et des alliés. Comme nous le verrons, aucune de ces considérations ne favorise les relations spéciales – financières, militaires et diplomatiques – de l’Amérique avec Israël.
Israël et notre situation hégémonique
Ce que j’ai écrit, cependant, n’est qu’un énoncé hypothétique de considérations de politique étrangère dans un monde multipolaire – et nous ne vivons pas dans un monde multipolaire. Les considérations américaines, du moins depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, sont impériales et hégémoniques. En tant que première superpuissance mondiale, les États-Unis misent sur un atout supplémentaire qui anime – voire domine – leurs considérations de politique étrangère : à savoir que leur statut d’hégémon mondial reste incontesté sur les plans économique et militaire. Les considérations impériales créent différents impératifs de politique étrangère, et les États-Unis ont joué un rôle pernicieux pour renforcer leur statut hégémonique – en renversant des gouvernements qui ne leur étaient pas utiles, en fomentant des révolutions et en attaquant les autres quand bon leur semblait. Le rôle actuel de l’Amérique en tant qu’adversaire principal de la Russie en Ukraine ne peut être compris que dans le contexte d’une tentative frénétique de préserver son hégémonie. Laissant de côté les considérations morales de l’hégémonie américaine, si on la considère comme un objectif de la politique américaine, la réalité est que le soutien servile de l’Amérique à Israël ne l’aide pas à préserver son hégémonie.
En termes simples, Israël n’est pas un allié significatif des États-Unis. C’est un frein au bien-être moral et économique des États-Unis. De plus, en soutenant les politiques mensongères du gouvernement israélien, les Américains et leurs intérêts deviennent moins sûrs et moins prospères. Il est temps que cette alliance soit remise en question – et durement remise en question.
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Les raisons non rationnelles de notre soutien
Avant même d’aborder les avantages présumés du soutien américain à Israël, nous devrions considérer ceux qui le soutiennent pour des raisons non rationnelles. Premièrement, il y a les juifs américains, de toute évidence. Même si on nous rabâche que suggérer la double loyauté des juifs américains envers les États-Unis et Israël équivaut à de l’antisémitisme, le fait de leur double loyauté ne peut être sérieusement remis en question. En effet, il ne s’agit pas du tout d’une double loyauté – il s’agit, presque uniformément, d’une loyauté singulière envers Israël qui l’emporte sur la loyauté envers les États-Unis. À cet égard, les juifs américains sont très différents de toutes les autres ethnies ayant immigré aux États-Unis. En une génération ou deux, tous les autres groupes venus ici sont devenus en grande partie des Américains avec proportionnellement moins d’intérêt pour leur pays d’origine à chaque génération, mais les juifs, dont beaucoup sont aux États-Unis depuis plusieurs générations, sont différents. Israël n’est pas seulement quelque chose qui les intéresse : Israël est leur principale préoccupation, surtout dans des moments comme celui-ci, où Israël est engagé dans une crise militaire. À l’exception d’un petit pourcentage de juifs progressistes, la grande majorité des juifs américains considèrent Israël – et le soutien américain à Israël – comme un élément déterminant de la vie politique. Bien qu’ils ne représentent qu’un faible pourcentage des Américains, les juifs américains sont largement surreprésentés dans le quatuor des puissances créatrices de culture moderne : (i) les médias et le divertissement ; (ii) le monde universitaire ; (iii) le gouvernement et le lobbying ; et (iv) la finance et la banque. Les juifs, grâce à leurs monopoles ethniques et à leur propension à la pensée de groupe, sont capables d’utiliser leur influence pour diriger le débat et la politique d’une manière qui penche massivement et uniformément dans le sens pro-israélien. En effet, l’AIPAC, une entité qui devrait s’enregistrer en tant qu’agent étranger, est le lobby le plus puissant aux États-Unis – et met à elle seule le Congrès dans sa poche. Les juifs, par leur influence et leur lobby, sont les principaux moteurs du soutien américain à Israël. Une récapitulation de cette influence démesurée avait fait l’objet d’une excellente enquête rédigée par des experts reconnus en politique étrangère John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt en 2007, «The Israel Lobby and the US Foreign Policy». Entre parenthèses, ce livre répondait à deux questions : la relation particulière entre Israël et les États-Unis alimente-t-elle les sentiments anti-américains au Moyen-Orient ? Si le soutien inconditionnel des États-Unis à Israël n’est motivé ni par l’intérêt national ni par une boussole morale, qu’est-ce qui explique la raison derrière cette «relation spéciale» ? Naturellement, les deux auteurs ont été accusés d’antisémitisme pour l’avoir écrit. Même s’il est dépassé de quinze ans, ce livre devrait être lu par tous car les problèmes qu’il identifie n’ont fait que s’aggraver.
L’hérésie par rapport au protestantisme
Deuxièmement, il y a les chrétiens évangéliques américains, et de nombreux observateurs de Fox News, Newsmax et OAN entrent carrément dans la catégorie des «idiots utiles». Il est hors de portée de cet essai d’aborder la théologie dispensationaliste défectueuse qui a conduit un pourcentage important d’évangéliques américains à devenir sionistes enragés et souvent assoiffés de sang, mais c’est un fait. Même si je ne suis pas protestant, Martin Luther, John Calvin, Huldrych Zwingli, John Wesley et John Knox seraient tous très surpris de constater – ou incapables de comprendre – la fascination relativement nouvelle des protestants pour le judaïsme et le sionisme cinq cents ans après la Réforme. Il suffit de dire qu’aucune des 95 thèses affichées sur la porte de l’église de Wittenberg ne contenait la moindre accusation selon laquelle l’Église médiévale aurait été trop soucieuse des juifs (même si elle l’était) ou que le parti réformé croyait qu’un nouveau royaume juif devait être créé en Terre Sainte. On se demande qui les a cooptés. Ainsi, une partie importante du GOP est donc sioniste militante en raison d’un dogme religieux hérétique, qui n’est pas sujet à discussion.
Le parti de la guerre
Troisièmement, il existe aux États-Unis un parti belliciste étroitement lié au complexe militaro-industriel réel. C’est un parti guerrier qui aime Israël parce qu’Israël entretient les conflits à travers le monde. La composante idéologique de ces personnes est un sous-ensemble de juifs, communément appelés «néo-conservateurs» (comme William Kristol, Robert et Donald Kagan, Richard N. Perle, «Scooter» Libby, Norman Podhoretz, Paul Wolfowitz, Eliot A. Cohen et Elliot Abrams). Inutile de dire que ce sont les gens les plus ignobles de la vie civique américaine et non seulement ils fournissent la forme de plaidoyer la plus bruyante et la plus agressive en faveur d’Israël, mais ils sont également, en pratique, seuls responsables des guerres américaines désastreuses au Moyen-Orient et de la situation actuelle de l’Amérique consistant à envisager une guerre nucléaire avec la Russie à propos de l’Ukraine. Contrairement à un État fonctionnant normalement – un État qui veuille la paix comme condition normative – nous avons une partie influente d’Américains qui aiment la guerre, les armements et les conflits, qu’ils étendent ou non l’hégémonie américaine. Les faucons de guerre, les néoconservateurs et les courtisans d’Israël, comme le sénateur Lindsay Graham, complètement cinglé, ou le sénateur décédé John McCain, n’étaient pas philosémites sur la base de convictions religieuses, mais sur la base de leur soif de sang.
Le boulet Jeffrey Epstein
Quatrièmement, sans porter de jugement sur qui que ce soit en particulier, la récente affaire Jeffrey Epstein amène également à se demander combien de politiciens et d’hommes de pouvoir américains soutiennent fanatiquement Israël pour la simple raison du kompromat, (qu’ils ont été piégés). Inutile de dire que l’idée selon laquelle le Mossad possède des photos et des vidéos de ces Américains dans des positions compromettantes avec des garçons et des filles mineurs est loin d’être hautement spéculative et contribue en grande partie à expliquer le fanatisme pro-israélien apparemment inexplicable de certains politiciens américains. Ceci étant, nous ne pouvons pas ignorer la simple corruption à l’ancienne.
La corruption, tout simplement
Il existe également une rationalité moins sexy consistant simplement à acheter des politiciens de manière apparemment légitime. Considérez Nikki Haley, partisane enragée d’Israël, ancienne gouverneure de Caroline du Sud et candidate républicaine à la présidentielle :
Haley a stupéfié Washington en démissionnant de son rôle dans l’administration Trump en 2018, moins de deux ans après son entrée en fonction. Un porte-parole de Haley affirme que les problèmes financiers de la famille n’avaient eu «aucune incidence sur la décision de l’ambassadrice Haley de quitter son poste» et souligne une section de la lettre de démission de Haley dans laquelle elle exprimait son soutien à la «rotation des fonctions». Mais la même lettre suggérait également que Haley avait peut-être en tête des projets lucratifs : «En tant qu’homme d’affaires», écrit-elle à Donald Trump, «j’espère que vous apprécierez mon sentiment selon lequel revenir du gouvernement au secteur privé n’est pas une forme de recul mais un pas en avant». En effet, depuis lors, la valeur nette de Haley est passée de moins d’un million de dollars à environ 8 millions de dollars. Comment a-t-elle pu gagner autant d’argent en si peu de temps ? En suivant un manuel éprouvé pour les politiciens qui cherchent à tirer profit de leur renommée. Les discours prononcés devant des entreprises comme Barclays et des organisations telles que le Centre pour les affaires israéliennes et juives lui ont rapporté plus d’argent en une journée que Haley n’en avait gagné en un an auparavant. On ne sait pas combien de conférences elle a données de 2019 à 2021, mais Haley a récolté 2,3 millions de dollars sur seulement 11 événements en 2022. Elle a écrit deux livres après avoir quitté l’administration Trump. Un mémoire de 2019 s’est vendu à plus de 100 000 exemplaires. Un titre de 2022 prévoyait plus de 350 000 $ d’acomptes. Haley a également offert des services de conseil, générant plus de 700 000 $ d’honoraires. Ensuite, il y a eu les conseils d’administration des entreprises. Elle est devenue directrice de Boeing en 2019, puis a démissionné l’année suivante, collectant plus de 300 000 dollars en espèces et en actions. Haley reste membre du conseil d’administration du United Homes Group, qui lui a fourni plus de 250 000 $, ainsi que la promesse de gagner beaucoup plus grâce aux subventions en actions plus tard.
On pourrait affirmer que quelqu’un a payé généreusement le soutien bruyant d’Haley à Israël. Pris ensemble, il existe plusieurs groupes au sein de la société américaine qui traitent le soutien américain à Israël de manière axiomatique – les juifs, les évangéliques, les faucons de guerre et les escrocs – de telle sorte que cela ne peut jamais faire l’objet d’un débat. Il ne sert donc à rien de s’engager avec eux, car Israël ne peut jamais être discuté de manière impartiale ou constructive étant donné le fondement non rationnel du soutien israélien à Israël. Cela dit, une grande partie des Républicains américains – catholiques, protestants non évangéliques, non croyants – sont tous théoriquement ouverts à une telle discussion.
La leçon du trumpisme
De plus, la force chimérique de l’appel de Donald Trump, même s’il était lui-même extrêmement pro-israélien, est une démonstration qu’un appel aux citoyens américains (ou à une partie significative) sur la base de ce qu’il y a de mieux pour ce pays et ses citoyens a encore une résonance. «Make America Great Again» – ou America First – était considéré comme une menace existentielle pour tous les partisans d’Israël d’abord cités ci-dessus. Le fait que Trump ait encore une influence significative est le signe que l’Amérique peut se réveiller à l’égard d’Israël, ce qui explique pourquoi Trump a été vilipendé comme aucun politicien ne l’a jamais été. À proprement parler, il est possible de défendre ce message avec un certain espoir de succès.
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Et la réciproque ?
La façade de la haute valeur d’Israël peut être percée par de simples questions.
Quelle est la base de notre soutien sans réserve à Israël ? Dans un premier temps, nous pouvons nous demander où est la réciprocité, ou, autrement dit, que reçoit l’Amérique de son soutien à Israël ? En effet, Israël, pays développé à revenus élevés, est le plus grand bénéficiaire de l’aide américaine. Pourquoi ? Qu’obtenons-nous en retour, au-delà des platitudes du bénéficiaire et de ses partisans américains ? Rien de valeur que je puisse voir, et je défie quiconque de le dire succinctement. Mis à part la sagesse de l’aide américaine aux pays du tiers monde – à la fois dans son efficacité et dans son souci d’économie – au moins l’aide américaine qui va au Nigeria ou au Guatemala pour construire des infrastructures, des écoles ou des industries a une composante morale. Il n’y a aucun avantage moral – et même un inconvénient immoral, évoqué ci-dessous – à subventionner Israël. Cette nation ne s’est pas révélée être un partenaire loyal : en effet, Israël espionne régulièrement les États-Unis et n’agit pas comme un allié dans la pratique. Même en ignorant les allégations les plus toxiques des «Israéliens dansants» et de leur implication dans les attentats du 11 septembre (vraisemblablement pour donner du pouvoir au parti de la guerre américain), l’implication plausible du Mossad dans l’assassinat du président John F. Kennedy (vraisemblablement à cause de son insistance pour qu’Israël ne développe pas d’armes nucléaires) ou l’attaque contre l’USS Liberty pendant la guerre de 1967 déclenchée par les Israéliens, qu’avons-nous gagné en échange des milliards de dollars des contribuables donnés à Israël ? Si nous prenons ces allégations au sérieux – ou même si nous enquêtons à leur sujet, ce qui est plus que ce que nous pouvons dire de l’ensemble de l’establishment médiatique – alors nous pourrions dire que nous subventionnons un ennemi non déclaré des États-Unis. Et même si nous mettons tout cela de côté, nous n’obtenons rien de valable en échange de notre soutien à ce qui équivaut à un régime juif pratiquant le nettoyage ethnique des Palestiniens depuis un siècle et se qualifiant de pays.
Pourquoi la haine des musulmans ?
On pourrait affirmer que nous obtenons – au moins potentiellement – des renseignements d’Israël sur nos ennemis au Moyen-Orient. Israël est, après tout, un géant technologique qui met la main sur l’électronique dans le gâteau de tout le monde. Mais cela soulève une autre question : pourquoi avons-nous des ennemis au Moyen-Orient en premier lieu ? Le monde musulman, aussi divisé soit-il, détesterait-il les États-Unis s’ils ne subventionnaient pas Israël en premier lieu ? Y aurait-il du terrorisme islamique aux États-Unis ? Aurions-nous besoin d’être soumis à des examens de sécurité intrusifs pour prendre l’avion à l’intérieur du pays sans notre soutien à Israël et la colère collective qu’il suscite dans une grande partie du monde ? Quel que soit l’avantage résiduel que les États-Unis retirent de l’obtention de renseignements israéliens, il est compensé par la considération préliminaire selon laquelle le besoin de tels renseignements serait totalement atténué si nous ne soutenions pas un régime qui braque le monde islamique comme il le fait. Pour être plus clair, les États-Unis n’ont jamais eu de colonies au Moyen-Orient comme la France ou le Royaume-Uni. Il n’y a donc aucune raison pour que les États-Unis soient un ennemi géopolitique de ces peuples. Mais nous le sommes, et pour une seule raison : en raison de notre soutien sans réserve à Israël. Enlevez cela et nous n’aurons plus jamais, pour diverses raisons, à nous soucier d’un autre 11 septembre (peu importe qui l’a orchestré). Israël est un nœud coulant international autour du cou des intérêts américains – notre soutien a un impact négatif exponentiel sur toutes les manières imaginables par lesquelles un État peut entretenir ses relations extérieures. On ne gagne rien à soutenir Israël et on perd beaucoup.
Les valeurs israéliennes : l’apartheid
Culturellement et au plan civilisationnel, nous avons peu de points communs avec Israël. Cela peut paraître étrange : après tout, ne sommes-nous pas un pays «judéo-chrétien» ? Mis à part la religion, qu’avons-nous de commun sur le plan civilisationnel avec Israël ? Est-ce un pays démocratique ? Respecte-t-il l’État de droit ? Est-ce un État non sectaire ? Respecte-t-il les droits des minorités ? Israël est un pays qui viole le droit international en toute impunité – une impunité que lui confère le veto régulier des États-Unis au Conseil de sécurité des Nations Unies sur les résolutions critiques à l’égard d’Israël ou, dans le cas de la guerre de Gaza, sur une résolution en faveur d’une pause humanitaire.
À tous égards, Israël est un monde très différent de l’Amérique. Ce n’est pas une démocratie si l’on considère que la moitié de la population sous son contrôle (les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie) n’a aucun droit démocratique. Israël bafoue l’État de droit. Il permet aux colons d’expulser physiquement les autochtones de leurs maisons et de leurs terres en Cisjordanie et a la témérité d’appeler cette pratique «la restitution» (le rachat) de la terre d’Israël. Il permet une immigration sans entrave des Juifs vers Israël – le tout avec une généreuse subvention – tout en gardant le contrôle sur ce qu’ils ont volés aux Palestiniens au cours des guerres successives. Il a – de plus en plus – des tendances théocratiques telles que la religion juive est favorisée au détriment des autres religions. Et tout cela ne dit rien de la propension des juifs à cracher – littéralement – sur les pèlerins chrétiens qui visitent les lieux saints d’Israël.
Du point de vue du droit international, Israël est un État d’apartheid. Selon Amnesty International :
«L’apartheid est une violation du droit international public, une grave violation des droits de l’homme protégés au niveau international et un crime contre l’humanité au regard du droit pénal international. Le terme «apartheid» était à l’origine utilisé pour désigner un système politique en Afrique du Sud qui imposait explicitement la ségrégation raciale ainsi que la domination et l’oppression d’un groupe racial par un autre. Depuis, la communauté internationale l’a adopté pour condamner et criminaliser de tels systèmes et pratiques partout où ils se produisent dans le monde. Le crime contre l’humanité de l’apartheid au sens de la Convention contre l’apartheid, du Pacte de Rome et du droit international coutumier est commis lorsqu’un acte inhumain (essentiellement une violation grave des droits de l’homme) est perpétré dans le contexte d’un régime institutionnalisé d’oppression et de domination systématiques par un groupe racial plutôt qu’un autre, avec l’intention de maintenir ce système en place. L’apartheid peut être mieux compris comme un système de traitement discriminatoire prolongé et cruel de la part d’un groupe racial envers les membres d’un autre groupe racial dans l’intention de contrôler le deuxième groupe racial».
Encore une fois, il n’est pas nécessaire d’aimer la religion de Mahomet (et ce n’est pas mon cas) pour comprendre que l’État moderne d’Israël est fondé sur le déplacement et la stérilisation politique du peuple palestinien, perpétrés par un État israélien qui encourage les suprémacistes juifs et les fanatiques religieux.
Le rapport d’Amnesty international
Largement ignoré par la presse américaine, Amnesty International a publié en 2022 un rapport accablant de près de 280 pages qui décrit une grande partie de ce que fait Israël envers les non-juifs en Palestine. «Le gouvernement israélien commet le crime contre l’humanité de l’apartheid contre les Palestiniens et doit en être tenu responsable». Il n’est pas nécessaire d’être d’accord avec la politique d’Amnesty International, mais la réalité est que le droit international devrait compter pour nous. Le droit international reflète les principes de la civilisation européenne qui se sont forgés au fil des milliers d’années et représentent une déclaration des droits humains fondamentaux. Des millions de Palestiniens vivent sous le contrôle israélien en tant que réfugiés apatrides sur leur propre terre, sans droit de vote ni droit de voyager librement. Le territoire de Gaza, qui abrite 2,3 millions de Palestiniens, est une prison à ciel ouvert dans laquelle les habitants vivent dans des conditions déplorables. Si un camp de concentration est un espace géographique confiné dans lequel une population est obligée de vivre avec de sévères restrictions en matière de liberté et de droits de l’homme, Gaza est un camp de concentration moderne. C’est au moins un camp d’internement. Et c’est ce que nous subventionnons ?
C’est encore pire que le rapport présenté ci-dessus. Dans ce qui est l’un des livres les plus convaincants jamais écrits sur le judaïsme rabbinique/talmudique et Israël, l’«Histoire juive d’Israel Shahak, La religion juive : le poids de trois mille ans», démonte les manières diverses et systématiques dont Israël déshumanise «l’autre» dans la loi et par d’autres moyens. Un examen impartial de ce qu’Israël a fait et fait prouve que les valeurs d’Israël sont en contradiction flagrante avec les valeurs politiques américaines au sens le plus large et le plus fondamental.
Et l’holocauste, alors ?
Il n’est pas rare d’entendre que l’Amérique «doit» son soutien aux juifs à cause de l’Holocauste. Laissant de côté la question de l’ampleur et de l’étendue de l’Holocauste, dans quel univers moral le préjudice subi par une partie permet-il à cette même partie d’infliger un préjudice à un tiers sans lien de parenté en toute impunité ? Quoi que nous puissions dire des Palestiniens, ils n’ont aucune responsabilité dans la Seconde Guerre mondiale. Pourquoi devraient-ils supporter les réparations – en termes de terres et de droits de l’homme – envers les juifs qui auraient été blessés par d’autres ? Quelle est la base morale de leur déplacement forcé ? Plus précisément, pourquoi devrions-nous subventionner ce préjudice ? Les États-Unis ne doivent rien aux juifs en ce qui concerne la Seconde Guerre mondiale – et ce, selon aucun calcul. En termes simples, il n’y a aucun impératif moral de la part des Américains pour soutenir Israël à cause de ce qui s’est passé pendant la Seconde Guerre mondiale. Quoi qu’il en soit, ce n’était pas la faute des Américains, ni celle des Palestiniens.
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Israël est un pays grotesque. Non seulement nous ne recevons rien en compensation pour notre soutien, mais les intérêts américains sont également lésés du fait de notre soutien à Israël. Il n’y a aucun impératif moral à soutenir Israël. Il n’y a pas de civilisation ni de valeurs partagées entre nous. Israël est un État voyou soutenu par le soutien américain. Un compromis sur ce soutien et Israël serait confronté à une menace existentielle étant donné les choses terribles qu’il fait et le manque de soutien international dont il bénéficie sans l’Amérique. Même si ma propre politique tend généralement vers la non-intervention, au point que je déplore les prétentions impériales américaines, je ne suis pas à l’abri des souffrances humaines au-delà des frontières de mon pays. Certes, je dénonce le meurtre de civils dans n’importe quel conflit – qu’ils soient israéliens, palestiniens ou rwandais, mais ce n’est pas mon affaire – ni l’affaire de mon pays – d’y remédier dans le cadre de la politique étrangère. Qu’il soit ou non trop tard pour s’attaquer au coût énorme du soutien immoral et stupide de l’Amérique à Israël, ces choses doivent être dites.
Israël n’est pas notre plus grand allié – et de loin.
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Post-scriptum : L’asymétrie militaire entre le Hamas et Israël – et la pluie de bombes et de missiles sur Gaza – donnent l’impression que rien ne peut arrêter la puissance israélienne au Moyen-Orient. C’est, du moins à mon avis, une mauvaise lecture de la situation. Israël est en grande difficulté – et ses problèmes sont internes plutôt qu’externes. La démographie d’Israël démontre qu’elle est déjà passée de ses prétentions démocratiques et libérales à quelque chose de plus résolument religieux-fasciste. Le Parti travailliste israélien, l’équivalent du Parti démocrate américain, est mort. Le Likoud, son équivalent du Parti républicain, est désormais un parti minoritaire soutenu par de purs fascistes et théocrates. D’ici une génération ou deux, Israël laissera tomber toute façade en termes de point commun avec les valeurs anglo-américaines de libéralisme politique. Les contraintes internes qui s’opposaient aux pires comportements israéliens s’effondrent irrémédiablement. Ce que je prédis, c’est que les Israéliens «normaux» fuiront probablement le pays alors que celui-ci poursuit sa route vers un talibanisme juif, ce qui ne fera qu’accélérer sa transformation. Une théocratie juive sera pratiquement impossible à soutenir, même pour les comparses américains, et cette théocratie est inévitable en tant que certitude démographique. Le moment venu, il s’agira de savoir quand, et non si, Israël deviendra une théocratie ouvertement antilibérale qui dira ouvertement ce qu’il essaye encore de mettre sous le tapis – une théocratie qui persécutera ouvertement et avec défi les non-juifs à l’intérieur de l’État. L’expérience de Theodore Herzl de construction d’une nation sioniste ne durera probablement pas un siècle avant que tout ne s’écroule.