Rétablir la sécurité, quoi qu’il en coûte

Dans une noté envoyée aux préfets le 4 juin, le ministre de l’Intérieur impute «le développement de faits extrêmement violents» aux «conséquences de la crise sanitaire»… Adressée aussi aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, la note compare les cinq premiers mois de l’année 2021, rapprochés à ceux de 2020. Elle pointe notamment l’augmentation de 28% des violences à l’encontre des services de sécurité, de santé et de secours, et une progression de 137% des interventions par le GIGN et le RAID sur des individus dangereux retranchés «forcenés». Le ministre demande aux préfets des « solutions de traitement » immédiates en matière de délinquance et une réponse le 9 juin. Mais ne faudrait-il pas surtout revoir à la hausse les dépenses publiques en matière de sécurité, pour endiguer la montée de la violence ?

Dans une note aux préfets, le ministre de l’Intérieur s’inquiète de la montée des faits de violence dans notre douce France, et il demande sous cinq jours un audit et des propositions pour faire face. On croit rêver ! Cela fait des années que cette progression saute aux yeux, et qu’elle va s’accélérant. On pourrait commenter à l’infini cette information, parce qu’elle résume à elle seule la façon dont nous sommes gouvernés. Le ressort essentiel de l’action gouvernementale, c’est la communication. Cette note veut nous convaincre que le ministre est sur le pont et qu’il agit. C’est raté, nous pourrions au contraire à bon droit nous inquiéter de cette réaction quasi affolée, et bien tardive, face à un tsunami que nous voyons grossir à l’horizon depuis longtemps.
La police en burn-out

A vrai dire, le temps de la communication, des commissions ou des états généraux n’est-il pas révolu ? Et bientôt, le temps des mesures législatives lui-même sera trop long pour faire face. Monsieur Macron n’a jamais voulu assumer, dans un discours clair, et surtout dans des actions volontaristes, les problèmes régaliens qui pourrissent la vie des Français. Soit qu’ils les subissent directement, soit qu’ils aient à supporter en permanence un climat de plus en plus lourd, facteur de stress, d’agressivité, de déprime. Les policiers sont les premiers acteurs et spectateurs de la violence, on ne s’étonnera donc pas qu’un sur quatre ait déjà eu des pensées suicidaires…

Aujourd’hui il faudrait une action décisive. Le parlement pourrait autoriser l’utilisation des ordonnances pour des décisions immédiates en matière de justice et de police. Aussi bien pour une évolution des textes et procédures que pour l’affectation de budgets supplémentaires à ces deux secteurs clés de notre cohésion sociale. Certes nos institutions ne facilitent pas juridiquement la prise de décisions rapides, mais si le gouvernement le décide il peut trouver les voies lui permettant d’agir, dans le respect de notre constitution. Il y faut la volonté, pour ce qui est du soutien populaire il semble qu’il ne saurait lui manquer.
La justice, moins de 2% du budget de la France

En matière de justice comme de sécurité, pour comprendre de façon claire la politique que nous subissons actuellement, il existe un document gouvernemental très facile d’accès, et dans lequel il suffit de naviguer pour comprendre la portion congrue dont souffrent notre justice comme notre sécurité.

Juste quelques chiffres : sur le total du budget par missions, des dépenses de l’Etat (643 milliards d’euros tout de même) : 1,88 % (12,07Md) est consacré à la justice Vous ne rêvez pas c’est le chiffre, 1,88% !! 3,31% est consacré à la mission sécurité (21,25Md) soit la police + gendarmerie. Ce qui fait en gros 5% des dépenses de l’état consacrées à la sécurité et à la justice.

Si l’on observe de près ce tableau interactif qui fourmille d’informations surgissant à chaque « clic » on voit bien sûr que l’utilisation des milliards pourrait souvent se discuter. Ainsi dans les dépenses « par ministère » on constate que la « transition écologique » se voit octroyer 44Md d’euros (à comparer aux 33 Md consacrés à la sécurité-justice). Quant aux dépenses « immigration et asile » du ministère de l’Intérieur (1 Md), 10% sont afféctés à la lutte contre l’immigration irrégulière mais 90% à… la « garantie de l’exercice du droit d’asile ». Tout est dit de la dimension idéologique de ce budget ! A l’évidence il serait possible de répartir un peu différemment certaines dépenses, pour libérer les milliards supplémentaires dont notre justice et notre police ont un besoin urgent.

Enfin il faut rappeler que la France se dote d’un plan de relance de 100 Md d’euros (dont 40 Md venant de l’Europe). Justice et police en profiteront-elles ? Cela n’apparaît pas. Rétablir la cohésion sociale, ça vaut pourtant le coût. Il y a bien dans ce plan un volet « cohésion ». Noble projet mais dont la police comme la justice me semble être le socle indispensable. Ceci avant que des décisions plus martiales ne finissent par s’imposer « quoi qu’il en coûte ».

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