En utilisant un dispositif prévu pour des situations de troubles particulièrement graves comme la guerre, l’exécutif érode des libertés acquises de haute lutte, estime un collectif de spécialistes du droit.
La grève de grande ampleur initiée dans les raffineries françaises des sociétés TotalEnergies et Esso-ExxonMobil provoque une pénurie de carburant dans le pays depuis plusieurs jours. Pour y répondre, l’exécutif a choisi de porter une atteinte majeure au droit de grève, pourtant liberté fondamentale, en actionnant un dispositif à haut potentiel liberticide : la réquisition.
L’article L2215-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) sur lequel se fonde le gouvernement, et qui prévoit la possibilité pour les préfets de «réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien et prescrire toute mesure utile», est issu d’une lignée de règles particulièrement dangereuses pour l’Etat de droit.
Une généalogie guerrière
En effet, les pouvoirs traditionnels de réquisition trouvent leur fondement dans les dispositions de la loi du 11 juillet 1938 sur «l’organisation générale de la nation pour le temps de guerre», qui préparait le conflit avec l’Allemagne nazie,